À 6 mois de l’entrée en vigueur de la directive PSD2 qui va bouleverser le paysage bancaire et technologique européen, nous allons aborder : - Les conséquences pour les banques de détail traditionnelles - La croissance des apps de Fintech et les avantages dont elles bénéficieront - Les possibilités des banques de détail pour défendre leur position dans une Europe post-PSD2.
Qu’est-ce que la PSD2 ?
La PSD2 (la deuxième Directive sur les services de paiement), qui a suscité énormément de débats, entrera en vigueur en Europe dans moins de six mois. À compter de janvier 2018, la PSD2 va révolutionner le secteur des services financiers aux consommateurs en Europe.
Pour résumer, la PSD2 imposera aux banques de détail et aux prestataires de paiement de permettre aux prestataires tiers d’accéder aux données de compte et de paiement, de manière sécurisée et en temps réel, à condition d’obtenir l’autorisation du titulaire du compte. Cela signifiera par exemple qu’une banque de détail telle que Barclays devra désormais partager les données autorisées de ses clients avec une app tierce telle que Revolut. Une aubaine pour les entreprises du secteur de la Fintech qui sont mobile first, ont tendance à se spécialiser dans un seul domaine (du moins pour le moment) et menacent collectivement de s’approprier certains services jusque-là dévolus à la banque de détail. L’accès aux données dont elles bénéficieront grâce à la PSD2 leur permettra d’améliorer et de développer les services qu’elles proposent, et renforceront leurs liens avec les clients des banques traditionnelles.
La Fintech va continuer de bouleverser le secteur bancaire en Europe
Cette directive va bouleverser la chaîne de valeur de la banque de détail traditionnelle. Bien que la plupart des interactions directes avec les clients se font par l’intermédiaire des banques, l’accès aux comptes imposé par la PSD2 va permettre aux entreprises de la Fintech de développer leur présence dans ce domaine.
Et elles sont extrêmement bien placées pour le faire. Les sociétés de la Fintech sont souvent expertes en mobile, un avantage considérable dans un monde où ce canal s’impose progressivement comme premier choix. À travers leurs apps, les entreprises de la Fintech sont déjà en mesure d’offrir une expérience agréable et fluide — un point sur lequel les banques traditionnelles ont encore du progrès à faire — en offrant des services tels que le regroupement de comptes, le paiement et la gestion d’investissement. Par bien des aspects, les apps de Fintech ont déjà modifié nos attentes en matière de gestion financière.
Les entreprises de la Fintech offrent déjà une gamme complète de services bancaires.
De plus, en dépit de leurs débuts modestes, les entreprises de la Fintech n’ont cessé de perfectionner leur technologie, leurs processus et leur offre produits (sans les contraintes des systèmes existants). Elles sont optimisées pour un monde mobile-first.
On peut donc conclure que les entreprises de la Fintech vont s’imposer comme intermédiaire entre les consommateurs et leurs comptes en banque. Les utilisateurs auront le choix entre une multitudes de services dégroupés et les banques traditionnelles ne domineront plus la chaîne de valeur bancaire. Avec pour ces dernières un vrai risque de se voir reléguer au rang de simples gestionnaires de compte, avec moins de visibilité sur les utilisateurs finaux ou moins de fidélité de la part de ceux-ci.
Alors que la chaîne de valeur est pour le moment largement dominée par les banques de détail, la PSD2 introduira une couche de services financiers dégroupés (généralement issus de la Fintech) entre les clients et leurs comptes.
À cet égard, les agrégateurs de services tels que Centralway Numbers et N26 (offrant également un service de banque mobile) constituent une menace réelle pour les banques de détail. Ayant le potentiel de proposer une suite complète de services bancaires et offrant de fait une plateforme aux autres prestataires, ils sont bien placés pour devenir les interlocuteurs financiers privilégiés des clients de demain. Ce changement sera bientôt effectif. N26 a révélé son projet de créer une plateforme financière, avec certains partenaires d’ores et déjà confirmés.
La Fintech dispose déjà d’une tête de pont
Il est clair que la directive PSD2 va singulièrement améliorer la position déjà solide des entreprises de la Fintech. Ces dernières se développent d’ailleurs rapidement en amont, avant même que la législation n’entre en vigueur. L’année dernière, nous vous présentions la croissance rapide des apps de Fintech — et la tendance s’accentue.
On observe une croissance rapide du nombre d’interactions avec les apps de Fintech
Parallèlement, les utilisateurs d’apps bancaires interagissent déjà avec les apps de Fintech — de nombreux clients sont en effet directement en lien avec les entreprises de la Fintech.
Sur les 5 apps de la catégorie Finance les plus utilisées par les clients de ces entreprises de la Fintech, 4 sont des banques de détail.
Alors que faire ?
En dépit des gros bouleversements à venir, les banques traditionnelles ont toujours une position dominante. Elles disposent d’une importante base clients, peuvent compter sur des marques fortes et reconnues et entretiennent des relations durables avec leurs clients — même sur mobile, les entreprises Fintech ne font pas le poids pour le moment.
Les banques représentent toujours la majorité des interactions entre les clients et les apps
Cette différence dans la taille rend toutefois plus difficile l’adaptation des grandes banques. Il n’est pas toujours facile de prioriser une opportunité de taille modeste (mais en croissance rapide) par rapport aux principales activités courantes — en dépit du risque important pour les années à venir.
Il n’y a pourtant pas de temps à perdre. Les entreprises de la Fintech ont déjà transformé les attentes client, elles améliorent en permanence leurs produits et leurs processus et acquièrent rapidement de nouveaux utilisateurs. Les produits proposés par les acteurs de la Fintech finiront par s’imposer comme norme, au détriment des banques traditionnelles qui n’auront pas su s’adapter assez rapidement.
Mais pour les banques qui s’y prendront suffisamment tôt, il reste possible de s’assurer une place de choix aux côtés des sociétés de la Fintech dans cette nouvelle chaîne de valeur. Il faudra au moins qu’elles sachent exploiter leurs bases utilisateurs importantes et la puissance de leur marque, tout en suivant les meilleures pratiques sur mobile et en proposant un niveau de service concurrentiel.
La sortie récente aux États-Unis du service de paiement Zelle, en partenariat avec les banques, est un excellent exemple de réactivité du secteur bancaire, et de nombreux clients d’App Annie du secteur bancaire gardent une longueur d’avance et se préparent aux changements induits par la directive PSD2 dans le secteur.
Les années à venir vont être intéressantes pour le secteur de la banque de détail.
Des méthodologies et des mises à jour de nos études sont disponibles ici.